Interview: Retour sur The Witcher 3: Wild Hunt avec ses créateurs

On dit que le temps passe vite quand on s'amuse. Il est difficile de croire que 6 ans se sont écoulés depuis la sortie de The Witcher 3: Wild Hunt en mai 2015. La WitcherCon qui se déroule le 9 juillet prochain est l'occasion de vous rappeler notre entretien avec les créateurs de CD PROJEKT RED sur leur expérience dans le développement de ce jeu unique et mémorable.
Excitation, envie, enthousiasme, nous les avons tous ressentis en attendant le troisième volet de la célèbre trilogie The Witcher. Le terminer après 2 DLC supplémentaires et plus de 100 heures de jeu nous a laissé des souvenirs inoubliables. Rejoindre le célèbre Witcher, Geralt de Riv, dans sa quête pour retrouver Ciri, l'enfant du destin, s'est gravé dans nos esprits. Pourtant, ce fut aussi une expérience très mémorable pour les créateurs du jeu qui ont passé près de 5 ans de dur labeur à le développer.

C'est mon histoire, pas la vôtre. Laissez-moi terminer.

L'un des piliers de la réussite de The Witcher 3: Wild Hunt, c'était l'incroyable script qui s'appuyait sur les romans à succès d'Andrzej Sapkowski. Quand on lui parle de l'écriture du scénario du jeu, Marcin Blacha, directeur scénaristique chez CD PROJEKT RED, s'en souvient comme d'une tâche complexe et exigeante :
- Dès le début, le plus gros défi, c'était la transposition du livre en jeu. Le style de Sapkowski dépeint le monde et ses héros en donnant au lecteur des contours que ce dernier doit combler par son imaginaire. De ce fait, chaque lecteur s'approprie « son » Geralt, alors que nous, il nous fallait créer un Witcher que tous les joueurs trouveraient attachant.
De plus, « notre » Geralt devait être interactif pour que les joueurs puissent le guider dans ses aventures de multiples manières. Heureusement, The Witcher 3 n'était pas le premier jeu où nous étions confrontés à ce genre de défis, puisque nous avions déjà créé le premier volet de la série.

Les rois meurent et les royaumes s'effondrent, mais la magie perdure.

La deuxième chose qui rend The Witcher 3: Wild Hunt unique, c'est son monde incroyablement riche, grouillant de lieux magiques et de personnages qui semblent presque vivants. Une grande part de la création de cet univers reposait sur les épaules de Lucjan Więcek, directeur artistique chez CD Projekt RED. Quand on lui demande aujourd'hui quelle partie du monde de The Witcher 3 il trouve particulièrement intéressante, il répond :
- Après réflexion, je crois que c'est l'archipel de Skellige, principalement du fait de ses paysages aussi grandioses que sublimes et de la fraîcheur de l'air. Je crois que passer une semaine dans un endroit pareil me ferait énormément de bien... J'aime beaucoup le côté ouvert, tant en termes de grands espaces que de liberté spirituelle.
Sinon, j'aimerais aussi passer un peu de temps à Blanchefleur. Les crépitements du feu, les bruits de la nature, de la forêt et de la rivière qui s'écoule... Que demander de plus, à cette époque où nous bétonnons tout ce qui nous entoure ?

Avant, tout était simple. Les monstres étaient méchants, les humains étaient bons.

Les quêtes de The Witcher 3 sont très différentes de celles d'autres RPG modernes. Elles nous donnent des choix nous permettant à la fois de façonner l'histoire du jeu et le monde dans lequel évoluent nos héros. Mateusz Tomaszkiewicz, directeur des quêtes chez CD PROJEKT RED, a beaucoup de bons souvenirs de l'époque du développement du jeu :
- J'ai adoré travailler sur le prologue, qui se passe à Blanchefleur et à Vizima. Le personnage de Vesemir est l'un de mes préférés et c'était cool de l'« accompagner » un moment. Les liens personnels entre Geralt, Ciri, Yennefer, Vesemir et les autres sorceleurs constituent une part très importante de l'histoire et ils sont l'une des choses que je préfère dans la série des Witcher.
J'ai de très bons souvenirs de la création de ce qu'on a appelé la quête d'Uma. C'est Dennis Zoetebier, l'un de nos designers, qui en est à l'origine, avec ma participation. Je me souviens qu'on a bien rigolé quand il a mit au point la scène de la beuverie avec les trois sorceleurs. Je me rappelle notamment une réunion où on avait fait cette quête avec le chef de projet et le responsable du studio. Les enregistrements sonores venaient d'arriver et on se marrait tellement fort en y jouant que les gens qui passaient dans le couloir jetaient un œil pour savoir ce qui se passait.

Des loups dormant sous les arbres, des chauves-souris se balançant dans la brise...

Ça a beau faire cinq ans, on continue de fredonner les chansons et les thèmes musicaux de The Witcher 3: Wild Hunt. C'est d'ailleurs à Marcin Przybyłowicz, l'un des brillants compositeurs à avoir agrémenté le jeu de morceaux fantastiques, qu'on le doit. Comme il l'admet lui-même, certains ont été composés sous haute pression :
- Je me souviens du travail qu'a demandé la musique de la quête du marais de Torséchine, et aussi de la scène de dialogue près du gobelin qui m'a inspiré le morceau de cette partie du jeu. Ça a été l'un des moments les plus difficiles de toute la production : le temps nous manquait et une étape importante du jeu approchait à grands pas. Toute la musique de Ladies of the Woods a été composée en quelques heures seulement !
Le développement de la première bande-annonce du jeu a été un autre moment marquant en termes de musique. C'était la première fois que la musique de The Witcher 3 serait entendue du public et on savait que cette première impression était extrêmement importante. On a travaillé pendant trois semaines pour y arriver et, au final, on a créé plus de douze versions différentes de ce morceau.

La légende continue...

Cinq années se sont donc écoulées depuis la sortie de The Witcher 3: Wild Hunt. Les créateurs se souviennent-ils encore aujourd'hui du sentiment qui les a envahis alors ? Comme l'explique Mateusz Tomaszkiewicz :
- Je me souviens que j'étais un peu crevé, en fait. Quelques jours avant la sortie, j'étais en tournée de promotion en Asie. Entre la fatigue du travail et le décalage horaire, j'étais rincé. Le jour de la sortie de The Witcher 3, l'idée que le jeu était enfin terminé et disponible au public dans le monde entier m'a semblé un peu irréelle.
De son côté, Marcin Blacha se souvient être resté plutôt calme, ce jour-là :
- J'étais content et vraiment fier, mais j'étais curieux de la façon dont le jeu serait ressenti par les joueurs sur le plan émotionnel. Je ne m'inquiétais pas de leur réaction vis-à-vis de The Witcher 3: Wild Hunt... Je savais que c'était un bon jeu.
- J'avoue avoir été un peu stressé en attendant la réaction des gens sur ce jeu auquel je travaillais depuis si longtemps. Je me souviens des journalistes et des joueurs accueillant très chaleureusement The Witcher 3: Wild Hunt lors des expos. Ce genre de réactions nous a donné de l'espoir quant à la réussite du jeu, mais je reconnais que l'attente m'a un peu épuisé. Je voulais voir les réactions des joueurs avant de prendre des vacances bien méritées.
En fait, on a mis tout notre cœur dans ce projet bien avant que les gens réalisent que ça deviendrait un énorme succès de l'année 2015. J'en profite d'ailleurs pour remercier tous les créateurs du jeu pour leur travail acharné et les incroyables moments qu'on a passés ensemble. Je trouve ça dingue qu'ont ait pu créer quelque chose d'aussi énorme avec aussi peu de monde. C'est leur talent et leur implication qui ont rendu tout ça possible.
Vous n'avez toujours pas mis les pieds dans le monde de The Witcher ? La WitcherCon est l'occasion idéale pour rattraper le temps perdu. C'est aussi une excellente occasion de jouer à The Witcher 3 Wild Hunt une fois de plus et de revivre tous les bons souvenirs de jeu qu'il nous a apportés.